Dans un premier article édité sur « Le caractère breton » : https://gebete29.wordpress.com/2018/11/10/le-caractere-breton/
J’ai essayé de démontrer ce que « caractère bien trempé du Breton » signifiait généralement. Aujourd’hui, j’ai envie de développer des traits de caractère comme la discrétion, la fermeté, l’imagination, la franchise (brut de fonderie), la pudeur, la fidélité, l’introversion, le sens du partage, l’esprit civique, la modestie et l’honnêteté qui n’appartiennent qu’aux authentiques Bretons.
Quid de l’emprise de l’Etat français sur cette magnifique région de France qui défend et revendique son identité. Tenter de décrire les contours de ces fameux traits de caractères bretons qui participent grandement à son identité sociale et dont on entend souvent parler est une gageure. Mais osons…
Je me suis toujours « senti » Breton. Plus je lis des choses sur la Bretagne et plus je rencontre de Bretons, plus je ressens que ce sentiment n’est pas une construction de mon esprit mais une réalité de caractère et de posture que je partage avec d’autres.
« Inutile de me dire ce que je dois faire ou ne pas faire, je ferais toujours ce que j’ai envie ».
Les bretons avancent souvent discrètement mais fermement. On observe des similitudes entre les Bretons et des traits de caractère commun. Qu’est-ce qui est commun et qui participe à l’histoire sur l’identité bretonne. Aucune étude sur des traits de caractères commun existe. Seules quelques études de comportements sociologiques existent visant à comparer des régions de France.
Tout d’abord, quelles sont les raison qui font qu’il existe une présence si riche et florissante du conte en Bretagne et pourquoi la mort est si présente dans le quotidien des Bretons.
En observant les éléments de la nature, notamment la nuit, avec le vent qui siffle dans les arbres, la présence d’une nuit étoilée ou l’absence de lumière par des nuages qui cachent toute luminosité du ciel, je me dis qu’à une époque où l’on ne connaissait pas la lumière électrique tous ces éléments naturels pouvaient stimuler l’imagination. Celle-ci donnait une explication à tous ces phénomènes à travers les histoires des contes et légendes.
Les Bretons n’ont-ils pas une propension importante à l’imagination notamment du fait d’une forte émotionnalité intériorisée. La mort est très présente en Bretagne notamment avec les histoires de l’Ankou ou des lavandières. La mort est présente aussi par cette histoire maritime où les femmes voyaient leurs hommes partir pendant des mois à la pêche à Terre Neuve et revenir lorsque la mer ne les avait pas pris. A Audierne, il existe une baie qui s’appelle la baie des Trépassées où la légende dit que les morts en mer viennent hurler. Chaque année, ces femmes se mettaient sur les côtes dans l’attente d’apercevoir ou non le bateau de leurs hommes à l’horizon. S’il était présent, la vie reprenait et c’était la fête le temps du retour à terre. S’il était mort, il fallait continuer à vivre pour pouvoir s’occuper des enfants.
Les angoisses aux contacts de ces éléments de la nature et de la dureté de la vie ont été probablement sublimées à travers toutes ces histoires pour rendre un peu acceptable ce quotidien.
Un Breton est direct dans sa façon de parler : « On m’a toujours dit que je pouvais manquer de « psychologie » en disant de façon brute ce que je ressentais, pensais ou observais ce qui pouvait me donner un aspect froid et dur comme du granit alors que je me ressentais intérieurement très sensible. Cette sensibilité aide à comprendre ce que vivent les Bretons pour les aider et cette « dureté » aide à ne pas être dépassé par ces émotions en sachant leur donner leur juste place pour ne pas être débordé par elles. Un article sur la langue bretonne dans le journal « Breton » qui évoque la structure du langage breton explique que l’image que renvoie un Breton n’est pas de la dureté mais peut-être due de ses origines bretonnes.
La langue reflète la façon de penser. Même si celle-ci est peu usitée, elle influe probablement sur les comportements de ses habitants. On dit que le Breton va droit au but quand il s’exprime et qu’il ne prend pas de gants pour dire les choses. On dit que la Bretonne a la langue « pointue » et qu’elle pique lorsqu’elle dit crument et directement les choses telles qu’elles sont. Lorsqu’on analyse l’organisation de cette langue, on a le sentiment que les Bretons s’expriment comme maître Yoda le Jedi de Star Wars. Le « je » est mis en fin de phrase pour mettre en début ce qui est le plus important : « Le train, je suis venu ». L’individu est en retrait. Le Breton n’est pas autocentré mais place ce qui l’entoure avant lui pour dire directement les choses sans artifices.
En Bretagne, le mot « bonjour » n’existe pas. D’ailleurs le mot breton le plus connu est « an revoir » (kenavo) alors que dans de nombreuses langues, il s’agit de « bonjour ». Quand deux Bretons se rencontrent, ils disent « ça va » (deiz mat), « comment vont les choses » (Mat an traou), « comment c’est pour toi » (Penaos eo ganit) ou « comment que c’est (Penaos eo). On voit bien que la façon de rentrer en contact avec l’autre est un rapport d’ouverture à ce qui est à cet instant et non pas autocentré sur les deux individus en présence. En français, deux Bretons diront plus facilement « il fait beau aujourd’hui » ou une autre phrase de description du contexte que « bonjour ».
« Les bretons, c’est comme le homard : carapaces durs et tendres dedans ».
Le breton est intérieur tout en étant très connecté à son environnement. Non seulement, il ne dit pas « bonjour » mais il invite plutôt traditionnellement ses convives pour « le café » que pour manger. Lors de ce café, il y a des crêpes, du gâteau, de la salade de fruit et de nombreux mets qui valent un repas ! Le Breton a un jardin dont il s’occupe beaucoup mais dans lequel il vit peu. Il est soit dans sa maison soit à l’extérieur. Il ne veut pas déranger ou s’exposer. Il existe un contraste entre la force de son intériorité et ce qu’il donne à voir dans le premier contact.
Le Breton est pudique et peu expansif. Il ne vous tapera pas sur l’épaule et sera avare de confidence. Il garde avec pudeur son intimité et son intériorité pour lui malgré l’intensité émotionnelle de ce qu’il peut ressentir. Il s’inscrira dans sa relation à l’autre dans le concret. Il ne flattera pas et ne promettra pas grand-chose. Il ne cherchera pas à rentrer dans l’intimité de son interlocuteur dès la première rencontre et le laissera venir à lui. Il ne cherchera pas à vous séduire pour avoir un relationnel fonctionnel. En fait, il est à l’opposé du caractère méditerranéen démonstratif. Par contre, une fois le contact et la confiance établis, la relation sera entière et « normale ». Elle sera même peut-être plus profonde et chaleureuse que dans d’autres cultures. Elle n’a pas besoin d’être contractualisée.
Le Breton est fidèle dans son engagement amical et l’amitié qu’il offre s’use rarement dans le temps s’il n’y a pas d’incident. Par contre, toute trahison à cette amitié la cassera définitivement.
La Bretagne en tête des régions où l’on parle le plus à son voisin. Lorsque vous êtes dans un festival ou dans un festnoz, vous pouvez en faire agréablement l’expérience. Il est aisé de parler aux personnes qui sont à côté de vous en écoutant de la musique ou en buvant un verre. A la différence d’une ville comme Paris, où lorsque vous parlez à quelqu’un dans la rue, le premier réflexe est de se demander ce que veut l’autre, ou de présenter une réaction de méfiance dans certaines autres régions.
Cette fidélité se traduit aussi dans le mariage. La Bretagne est la région de France où le taux de divorce est le plus bas : 1,72 divorce pour mille habitants. C’est deux fois moins qu’à Paris ou dans le PACA. Le Breton est fidèle dans la parole et l’engagement même si la culture catholique, encore bien ancrée en Bretagne, influe aussi sur ces chiffres.
Le Breton est partageur. La Bretagne est la deuxième région après la Corse pour le nombre de bar par habitant mais la neuvième région pour la consommation régulière et à risque d’alcool. Ils sont deuxièmes derrière les Francs Comtois pour la consommation ponctuelle d’après l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Les Bretons boivent moins que par le passé mais ils aiment faire la fête. D’ailleurs, les plus grands festivals de musique comme les vieilles charrues sont en Bretagne.
La pratique sportive est particulièrement développée en Bretagne.
Le Breton : honnêteté, rectitude et discipline. C’est en Bretagne que l’on respecte le plus la loi. Ils sont moins procéduriers que dans d’autres régions. Les tribunaux sont moins engorgés qu’ailleurs. Il y a deux fois moins de dossiers aux prud’hommes qu’en Ile de France ou dans le PACA et quatre fois moins que dans les tribunaux de commerce de ces mêmes régions. Quand on se « tape » dans la main en Bretagne, on respecte son engagement. Le breton préfère résoudre leurs différends par le dialogue que devant la justice. La parole donnée est pleine de valeurs. La Bretagne est la région de France où le nombre de vols de voiture est le plus bas, soit six fois moins que dans le PACA.
Le breton a l’esprit civique. Aux élections de 2012, les bretons ont été ceux qui ont le plus votés. La Bretagne est la région qui connait le moins de fraude fiscale. Ils trichent deux fois moins que dans le sud-est et trois fois moins qu’Ile de France.
Ce résultat est probablement dû à la fois à un sens du collectif et à la nature anxieuse du breton qu’à sa volonté de tranquillité.
Le respect pour le collectif s’exprime aussi par l’écologie et les dons du sang. La Bretagne est la plus performante en écologie d’après l’hebdomadaire La Vie. Les Bretons sont les troisièmes donneurs de sang. On retrouve de très nombreux festivals en Bretagne mais aussi les plus grands de France et d’Europe. Ces festivals peuvent avoir lieu grâce à la présence de nombreux bénévoles qui prennent plaisir à être là, à être ensemble et à partager.
Le taux de suicide est particulièrement haut en Bretagne. Il est de 25,3 pour 100 000 habitants soit 65% plus élevés que la moyenne nationale qui est de 15,1%. Ce chiffre reflète l’intensité de vécu intérieur du breton qui contraste avec la pudeur de ce qu’il exprime extérieurement.
Les Bretons sont sérieux, modestes et raisonnables. Ces traits de caractère se traduisent notamment dans les performances scolaires. La Bretagne est régulièrement la première pour le nombre de bachelier par classe d’âge. Par contre, ils privilégient les formations courtes en post bac. Sont-ils modestes, pas assez ambitieux ou réaliste en sachant se satisfaire de ce qu’ils ont et peu prisonniers du désir ou du regard de l’autre qui sont deux leviers à la motivation sociale ? Le breton n’a pas besoin d’être admiré mais il a besoin qu’on le respecte pour se sentir aimé et être en confiance. Aussi, il n’a pas besoin d’un titre scolaire ou autre pour se sentir exister et être digne. Il lui suffit d’être lui. Un autre facteur qui peut influer sur le manque d’empressement vers les hautes études est le fait que la Bretagne a connu la modernité de façon plus récente que d’autres régions. Jusqu’aux années 50, la Bretagne était un pays fortement agricole dans les terres et marins en bord de mer. L’industrialisation est venue progressivement ensuite. Peut-être ce facteur explique une moindre grande culture des grandes études.
En Bretagne, on peut se faire confiance. A l’heure actuelle où l’avenir est dans l’entraide, c’est un atout pour construire une économie du lien.
La modestie s’exprime aussi à travers la danse bretonne. Dans ces chenilles qui se construisent dans les Festnoz, c’est le groupe qui s’exprime et non pas les performances de l’individu sur la piste de danse. L’émotion de la danse est vécue collectivement et intérieurement à travers une danse ancrée dans le sol, source d’une transe collective sous les lumières des étoiles, qui réunit toutes les générations. L’emblème de cette modestie sont les frères Morvan : des agriculteurs célèbres dans le monde entier qui chantent avec leur chemise à carreau et leur casquette vissée sur la tête et qui n’ont jamais quitté la Bretagne. Au festival des vieilles charrues, ils ont réuni un public plus grand que Bruce Springsteen en jouant avec les Tambours du Bronx (60 000 personnes). Bien souvent, les Frères Morvan jouent bénévolement pour la « bonne œuvre » et le plaisir de partager leur musique.
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